Part I. – Was it a dream ?

Octobre 2002

- Will ! Tu peux me faire léviter encore ?
- Pas maintenant Charles.
- Allez ! S'il te plait Will !
- Bon d'accord.

William se concentra, murmura un sort que Charles ne put entendre et le fit léviter d'un bon mètre. Le petit garçon, s'envolant dans les airs, éclata d'un grand rire, qu'il communiqua à son aîné. Il y avait chez les deux frères une complicité particulière qui les unissait, comme s'ils n'avaient besoin que de l'autre pour être heureux. Bien sûr ils aimaient les autres membres de leur famille, mais ce n'était en rien comparable à ce qu'il pouvait se passer entre eux. Une alchimie parfaite, une osmose constante. Charles passait son frère au-dessus de tout et l’idolâtrait ; il se plaisait à dire qu'un jour, il serait comme lui.
Charles était né dans la noble famille des Knightoak, dans le quartier de Kesington à Londres. Propriétaire d'un grand manoir à l'intérieur même de Hyde Park, le statut de la famille, autant financier que de sang, était de renommée nationale. Bien qu'ils descendaient d'une longue lignée de Sang-Pur et qu'il était attendu d'eux qu'ils perpétuent la pureté de leur sang, la dernière génération des Knightoak n'avait pas été élevée dans la tradition de la haine des nés-moldus.
Quatrième de la fratrie de cinq, Charles ainsi que ses frères et soeurs avaient tous hérités de l'intelligence de leur mère et réussissaient parfaitement leurs études. William, en dernier année à Serdaigle et Préfet-en-Chef, excellait dans toutes les matières, Elizabeth, du haut de ses seize ans se prédestinait à l'Université Fidelitas pour y suivre un cursus Médicomage tandis que Frederick se démarquait par ses aptitudes en Potions et surtout son attrait pour la Magie Noire. Quant à Charles et Rebekah, ils manifestaient déjà des pouvoirs bien avancés pour leur âge, et le petit quatrième n'avait qu'une hâte, rentrer à Poudlard l'année suivante. Mais son entrée ne se fit pas vraiment dans les conditions idéales.

Un soir, très tard pendant les vacances de février, alors qu'il n'arrivait pas à s'endormir, Charles entendit crier dans la cuisine. Prenant soin de ne faire aucun bruit, il alla dans les escaliers pour entendre ce qu'il se passait. Il reconnu aussitôt la voix de William, puis celle de ses parents. Il ne comprenait pas vraiment ce qu'ils disaient, les cris étaient trop forts, inintelligibles. Les voix s'élevaient en même temps, l'une essayant toujours de dominer l'autre. Charles se souvint des derniers jours et de l'ambiance pesante, tendue qui avait régné sur le manoir. Les problèmes latents entre son père et William avaient enfin fini par faire surface dans une explosion de cris et de verre brisé. Soudain, il vit un éclair rouge dans la cuisine, puis sa mère crier et William quitter la pièce à grandes enjambées.
Charles remonta quatre à quatre les escaliers et couru silencieusement jusqu'à sa chambre. Il se glissa sous sa couette et fit semblant de dormir. Il écoutait attentivement chaque bruit dans la maison, mais son cœur battait si fort qu'il entendait à peine les pas de son frère sur le plancher. Il le devina alors se dirigeant vers sa chambre. Ce qu'il y faisait, il n'arrivait pas à le percevoir. Il attendit, puis soudain, la porte de sa chambre s'ouvrit, laissant entrer la lumière du couloir. Puis Charles sentit la présence de son frère. Ce dernier glissa sa tête près de celle de son frère et murmura « Je suis désolé Charly, pardonne moi... ». Il l'embrassa sur le front, et le petit garçon sentit une goutte d'eau tomber sur son visage. Il pleurait. Charles comprit aussitôt, mais l'horreur qui le saisit fur si grande qu'il en resta pétrifié. Son frère le quittait, l'abandonnait mais il ne pouvait bouger. La lumière s'évanouit et le petit garçon, encore en position fœtale dans son lit, pleurait comme il n'avait jamais pleuré. Soudain, la porte d'entrée claqua. Le garçon réagit aussitôt, couru aussi vite que ses petites jambes lui permettaient, dévala les escaliers et sortit du manoir pour rattraper son frère, se moquant des appels de sa mère qui l'avait vu sortir. Mais il était trop tard, il était parti, il avait transplané. Il était parti, et il n'avait rien fait pour le retenir. Il était parti... Ses jambes faiblirent, il fut pris de vertiges et s'évanouit.


Juin 2003

« Chaaaaaaaaarles ! Viens vite ! Ton père veut te voir. » avait hurlé la mère, sa voix magiquement amplifiée résonnant dans tout le manoir. C'était la troisième fois qu'elle l'appelait ainsi. Il se passait quelque chose. Mais Charles ne s'en souciait guère. Pourquoi irait-il voir l'homme qui lui avait enlevé son bonheur, son frère... Il entendit des pas précipités, puis Elizabeth apparut dans l'encadrement de sa porte. « Il est en train de mourir , viens ! » Charles considéra sa grande soeur un moment, puis se leva. Il prit son journal intime avec lui, celui qu'il avait demandé après que son frère ne fût parti. Charles s'était terré dans un silence morbide à son abandon et cette demande avait été la seule prise de parole du garçon depuis. Il la suivit silencieusement jusque dans la chambre de ses parents. Toute la famille était réunie, enfin, presque toute la famille... Charles les regarda un à un. La pièce était emplie d'une tristesse sans nom, d'une douleur insoutenable mais le garçon restait de marbre. Ils ne souffriraient jamais autant qu'il l'avait fait souffrir. Il passa devant sa mère sans la regarder. Dans la douleur, elle perdait toute sa grâce, reniflant bruyamment derrière son grand mouchoir en soie. Il se posta à droite de son père et le fixa.
« Ahhh... Mon grand. Ça me fait plaisir de te voir, dit-il d'une voix faible, presque inaudible. Je suis désolé mon fils... » Et tandis qu'il continuait à parler à son plus jeune fils, les yeux plein de larmes, ce dernier ne cessa de penser à quel point il haïssait cet homme. Quand il eut terminé sa litanie, il fixa son fils des yeux. Et Charles lui rendit son regard, seulement il était froid et cruel. Non, il ne lui répondrait pas. Non, il ne le pardonnerait jamais. Sans autre cérémonie, il quitta la pièce sans même regarder l'homme qui mourait.

Part II. – Night of the Hunter

Maman,
Je crois que j'ai fait une bêtise... Viens vite s'il te plait. J'ai peur..

Charles regarda la courte missive une dernière fois, puis la plia et la remis à sa chouette effraie. La saisissant d'une patte, l'animal fixa le jeune adolescent du regard puis s'envola sans demander le Miam'hibou auquel il avait droit, lui-même avait senti la détresse dans les yeux de son maître. C'était la première fois qu'il écrivait à sa mère en quatre ans, mais devant l'urgence de la situation, il n'avait pu faire autrement. Du haut de la Volière, Charles regarda la Forêt Interdite et se gratta machinalement le mollet. Il souleva une nouvelle fois son pantalon, la morsure était toujours là.

La veille, le jeune Gryffondor, le premier de la famille, avait fait le mur avec deux de ses camarades et s'était faufilé dans la Forêt Interdite pour "se faire peur". "C'est la pleine lune ! Allez viens, ça va être drôle !" Charles n'avait pas eu besoin qu'on le lui répétât une deuxième fois. Il était toujours partant quand il s'agissait de sortir, encore plus la nuit. Même la Forêt Interdite ne faisait pas peur au jeune garçon. Les histoires de Loup-Garou, c'était bon pour les premières années. Il suffisait d'écouter les soirs de pleine lune, aucun hurlement n'était entendu du haut de la tour de Godric Gryffondor. Du moins c'était ce que pensaient les jeunes élèves, mais l'épaisseur de la forêt, tout comme elle ne laissait passer aucune lumière, qu'elle fût solaire ou stellaire, ne laissait passer aucun sons et les hurlements des créatures maudites n'échappaient pas à la règle. C'étaient donc confiants de ne tomber que sur quelques Botrucs que Charles et ses amis s'étaient faufilés en dehors du château pour une virée nocturne au coeur de l'endroit le plus dangereux de toute l'Écosse.
Les Ténèbres. C'était à cela que ressemblait la forêt la nuit. La lumière de la Lune, aussi pleine fût-elle, n'arrivait pas à traverser l'épais feuillage qui s'élevait plusieurs mètres au-dessus d'eux. La lueur même de leur baguette ne semblait pouvoir pénétrer l'obscurité toujours grandissante à plus de quelques pas. Les trois courageux élèves progressaient lentement, s'enfonçant un peu plus dans cet environnement oppressant, pesant. L'obscurité alentour ne leur offrait pas un grand champ visuel et Charles commençait à regretter cette excursion. Ses deux compères qui le précédaient, eux, riaient à gorge déployée. Peut-être espéraient-ils attirer une créature ou deux, mais Charles savait que cela ne marcherait pas. Les créatures de la nuit étaient souvent craintives, qui fuyaient la lumière vive et le bruit trop fort. « Sauf les prédateurs... » Gryffondor était la maison réputée pour la bravoure et la passion qui habitaient ses élèves, ce n'était certes pas les plus intelligents, mais ils n'étaient pas tous idiots non plus. Charles avait eu le privilège de grandir dans l’aristocratie londonienne. Il avait éveillé très tôt ses pouvoirs et l'éducation qu'il avait reçu l'avait toujours poussé vers le haut, de même que l'aide d'Elizabeth et Frederick l'avait bien aidé, tant et si bien qu'il se plaçait parmi les meilleurs élèves de sa promotion, toute maison confondue. Il savait donc qu'ils étaient en danger ici, mais il aimait tellement l'adrénaline que procurait ce genre d'excursions, qu'il n'avait pu s'empêcher d'y aller. S'il réfléchissait beaucoup, il le faisait surtout après coup, préférant laisser libre court à son impulsivité. Cela lui avait souvent causé des problèmes, mais il parvenait toujours à bien s'en sortir. Soudain, il entendit un craquement sur la gauche. Instinctivement, il tourna sa baguette vers la source du bruit. Mais il ne vit rien. Il hésita, puis sentant ses amis s'éloigner, préféra les rattraper ; ces derniers n'avaient même pas entendu le bruit inquiétant tant ils étaient bruyants. Il raconta ce qu'il venait d'entendre à ses compères mais ces derniers lui rirent au nez. "Complètement inconscients ces deux-là..." Au même moment, un grognement se fit entendre à quelques mètres devant eux. Les trois garçons se figèrent sur place, tremblant de la tête aux pieds. Le premier de la file, Lukas, leva un peu plus sa baguette. Ils virent alors la lumière de la baguette se refléter dans les deux grands yeux noirs de la bête.
Un éclair rouge jaillit de la baguette de Charles aussitôt. Sans prendre le temps de voir s'il avait bien visé, il partit dans le sens inverse en courant, criant à ses deux amis d'en faire de même. Leur situation était désespérée, ils auraient beau courir, la créature les rattraperait forcément. Ils s'étaient tellement enfoncés dans la forêt qu'il en avait perdu son sens de l'orientation. Seul l'instinct le guidait maintenant. Heureusement pour lui, il ne lui avait jamais fait défaut. Ils couraient depuis quelques minutes, lançant des éclairs sans arrêt en arrière, sans même regarder, évitant les branches autant que possible. S'ils s'arrêtaient un instant, ils étaient mort. Ils étaient mort de toute façon.. Puis Charles entrevit une solution. Tout en courant, il s'écria "Il faut grimper dans les arbres ! On va mourir sinon ! Continuer à lui lancer des sorts, je cherche l'arbre qu'il nous faut !" A l'aide d'un Lumos Maxima, le jeune sorcier avisa un arbre dans les branches leur permettrait de grimper facilement pour se réfugier dans les hauteurs à une dizaine de mètre. Il indiqua la position de l'arbre à ses amis, et une fois proche, il tenta le tout pour le tout. Il se retourna vers la créature et cria "Lumus Solem !" Le Loup-Garou se prit la lumière solaire de plein fouet, l'apeurant sur le coup, suivi d'un Stupéfix, laissant le temps à ses deux acolytes de grimper dans l'arbre. Il s'élança aussitôt sur les branches, mais la bête était de nouveau à sa poursuite. Elle sauta et ses crocs se plantèrent dans le mollet droit du jeune garçon, qui se rattrapa à une branche, de toutes ses forces. Lucas et son ami réagirent aussitôt et lancèrent une salve de sort pour faire lâcher prise à la bête. A peine était-elle retombée sur le sol qu'ils aidèrent Charles à monter plus haut dans l'arbre, coupant les branches au fur et à mesure pour éviter que le loup-garou ne fasse de même.
Ils passèrent donc le reste de la nuit dans cet arbre, attendant avec impatience le retour du soleil. Charles avait été mordu par un loup-garou, il connaissait le sort qui lui était réservé. Ses deux amis n'en parlèrent pas de la nuit et il leur en fut reconnaissant. Tout ce qui lui importait, c'était de rentrer au château et de se glisser dans son lit bien chaud, loin de cet enfer. Sa jambe le lançait terriblement et le mal semblait se répandre dans tout son corps. Le poison lycanthrope faisait son effet et s'imprégnait de la moindre parcelle de son corps. Dans un mois, il deviendrait la bête qui l'avait chassé cette nuit.


Cher Journal,

Ça y est, je me suis transformé pour la première fois hier. C'était horrible. Et douloureux. Vraiment douloureux. Mais on m'a dit que la douleur s'atténuait avec le temps. Seul le temps peut la calmer, pas même la potion. Non, elle, elle ne sert qu'à me contrôler. Mais, j'ai l'impression de ne pas avoir été calme. C'est vraiment bizarre. Mon corps se souvient de tout, mais pas mon esprit. Comme s'il avait été annihilé par le loup qui est en moi. Ça me fait peur quelque part.. Mais, ce qui est le plus dérangeant, c'est ce sentiment de satisfaction ce matin. Quand je me suis réveillé dans la Cabane Hurlante, et même maintenant encore, tout allait bien. Cette colère que je gardais enfouie au fond de moi, elle n'est plus là. Comme si le loup s'en était nourri. A part cette douleur physique, tout va bien.. Tout va bien...

Part III. – The Story
"This is the story of my life, these are the lies I have created"

Charles vivait la belle vie. Déjà à Poudlard il avait vécu sa vie d'étudiant pleinement, mais depuis qu'il était majeur et n'habitait plus sous le même toit que sa mère, ce n'était que pur bonheur. Même si les années avaient passé, il en voulait toujours à sa mère. Même si elle ne l'avait pas fait partir d'elle-même, elle avait appuyé la décision de son mari et n'avait pas empêché le départ de William. Pour cela, il lui en voudrait pour toujours.
Il avait appris à vivre sans cette présence réconfortante, sans cette autorité fraternelle. Il s'était construit son propre monde, où l'autorité, quelle qu'elle fût, n'avait d'emprise sur lui. C'était d'ailleurs pour cette raison, cette passion d'enfreindre les règlements, qui l'avait poussé à aller dans la Forêt Interdite quatre ans plus tôt et se faire attaquer par un loup-garou. Mais il ne le regrettait pas. A dire vrai, Charles aimé cette dualité en lui, ce fond de noirceur, de violence et de rancœur que la bête faisait naître en lui juxtaposé à la douceur et la générosité dont il pouvait faire preuve, la confiance aveugle qu'il mettait en ses amis.
Son secret, il avait su bien le cacher aux yeux du monde, lui permettant de profiter de la vie étudiante comme n'importe quel sorcier commun. Les amis, les amours, les sorties, les fêtes, l'alcool, Charles connaissait tout ça et se noyait dans cet océan de sensations, de rires et de moments volés. Mais s'il était un garçon sympathique et plus ou moins aimé de ses camarades, il était rare qu'il se rapproche d'une personne assez facilement (encore une fois, sa nature pouvait effrayer les gens et pire seraient les conséquences pour lui s'ils décidaient d'en parler). Il s'était donc construit un petit cercle d'amis sincères pour qui il ferait l'impossible et qui en feraient de même (du moins le pensait-il). Du côté des amours, Charles avait eu quelques histoires de cœur en fin de scolarité à Poudlard, mais il était à l'Université, c'était fini tout ça. Profiter de la vie étudiante était ce qu'il s'était promis, aussi n'allait-il pas s'embarquer dans une longue relation amoureuse avec un garçon maintenant, quand tellement de belles fesses se promenaient dans le coin. De plus, si le jeune homme n'était pas forcément taillé comme un dieu grec, il profitait surtout de son charme et de sa « gueule d'ange » pour attirer les garçons dans son lit, comme le disait toujours Elizabeth. Son homosexualité, il ne s'en cachait pas. Il était fier de qui il était, et cela dérangeait, lui ne se dérangeait pas pour envoyer quelques sorts envers ses détracteurs.
Quant à la magie, Charles restait un élève toujours aussi doué, se classant toujours parmi les meilleurs. S'il y avait bien une chose qu'il aimait par dessus tout, c'était la magie, la pratiquant à la moindre occasion. De plus, le jeune homme avait toujours eu des prédispositions au maniement de la baguette donc quand il s'agissait d'apprendre, cela rentrait plus facilement dans sa petite tête souvent distraite. Enfin, il ne saurait dire si la transformation avait augmentait sa maîtrise de la métamorphose, mais depuis qu'il était devenu Loup-Garou, sa maîtrise de la matière avait augmenté. Peut-être était-il entré en symbiose avec le poil de loup-garou qui se trouvait dans sa baguette, le meilleur élément qui fût pour les métamorphoses, et que ses capacités s'en trouvait fortement grandi.