La petite fille aux longs cheveux bruns posa ses mains miniatures sur la vitre froide et embuée. Il pleuvait et l’eau dégoulinait doucement sur la fenêtre. Janis aimait regarder les gouttes descendre, elle avait l’impression qu’elles faisaient la course. Alors elle choisissait une goutte et l’encourageait très fort pour qu’elle arrive avant sa voisine. C’était la seule chose qu’elle pouvait faire lorsqu’on l’enfermait dans la pièce vide du fond du couloir. On lui avait expliqué que c’était pour son petit frère, mais ça faisait bien cinq ans qu’on la bassinait avec ça et il n’y avait toujours pas de bébé. C’était pour ça, d’ailleurs, qu’on l’avait mise ici. Sa maman était encore revenue de l’hôpital en pleurant et lorsque Janis avait demandé pourquoi, son père l’avait poussé dans la chambre du bébé qui ne naitrait jamais. Ils voulaient un garçon, bon. Mais pourquoi est-ce que ça devait lui retomber sur la tête ? Plus tard, Janis appris que les Vélanes donnaient majoritairement naissance à des filles lorsqu’elles s’unissaient avec des sorciers. Sa grand-mère avait été une de ces fées, et n’avait eu que des petites filles. « Janis, tu peux descendre. » La clé grinça dans la serrure et les pas de sa mère s’éloignèrent vers l’escalier. Doucement, Janis décolla ses mains de la fenêtre, les essuya sur sa robe et trottina vers la porte. Elle se rendit à l’étage inférieur en sautillant sur les marches de bois. Ludmilla Olmámený l’attendait, assise dans un gros fauteuil moderne.