- Aide-moi, je t'en supplie. Brian n'est plus là pour veiller sur nous, et maman est de son côté... toi seule pourra me venir en aide, Shaïra. M'abandonnes pas.

Elle éclata en sanglot et je ne pus me retenir, la prenant dans mes bras et caressant ses longs cheveux d'un blond aux reflets argentés afin de tenter de l'apaiser. Ce n'était pas la première fois que je la voyais dans cet état, mais c'était par contre la première fois et certainement la dernière, qu'elle venait me demander de l'aide. Bien que j'étais sa cadette de deux ans, on me considérait à tort comme étant l'aînée, car j'avais bien plus de responsabilités à endosser depuis que père et Brian étaient partis, l'un marchant vers la mort, et l'autre s'envolant vers la liberté. Depuis, j'étais seule, livrée à moi-même, tandis que ma soeur, Eiraen, était sous les griffes de notre oncle.

Laissez-moi vous raconter pourquoi la situation, au manoir, fut aussi désastreuse à partir du moment où père fut tué.

Mon père, Edward, était un homme noble et bienveillant. Je pense que je n'aurais pas pu rêver mieux en tant que figure paternelle. Il prit soin de notre éducation, veillant sur nous afin que nous devenions courtois, intelligents et éloignés du Mal. Ma mère, Zephyr, ne s'était jamais donnée cette peine. C'était une demi-Vélane et elle était, bien évidemment, d'une beauté fracassante. La vieillesse ne l'a pas rendu plus laide. Elle aimait les belles choses et courir après le bonheur et une vie dynamique. Être une mère de famille ne lui suffisait pas. Elle avait toujours eu besoin de plus. Contrairement à mon père, elle n'était guère passionnée par les dragons. Ils n'avaient rien en commun, à vrai dire. Leur mariage avait été un souhait de mes grands-parents maternels, qui avaient jugé qu'il était utile pour eux d'unir leur fille à une famille aussi prestigieuse que les Velaryon. Mon grand-père paternel, Peter, avait approuvé, constatant qu'avoir une belle-fille aux atouts physiques non négligeables n'était pas désavantageux, bien au contraire. Mon père avait donc obtempéré, séduit par la sublime Zephyr Walsingham. Malheureusement, il ne fut pas le seul à tomber dans le piège : mon oncle s'était épris de ma mère rapidement, la courtisant et lui proposant même de divorcer afin qu'elle se remarie avec lui. Il ne se doutait pas que ce jeu le rendrait fou et paranoïaque.